Le pollen porté par le vent est la plus ingénieuse des structures, un élément à l’architecture précise et complexe, dont l’évolution a permis des trésors de sophistication. Les arbres et les plantes trompent leur immobilité par ces minuscules grains voyageurs, portant leurs gènes en devenir, les futurs bouleaux, pins, graminées ..

Les humains depuis qu’ils sont sur terre partagent avec ces pollens le même air, mais la force anthropique que nous exerçons sur notre milieu commun a brisé le bel équilibre, comme l'atteste dès 1827 la découverte du rhume des foins. Et le partage de l’air pollué a transformé les éléments de vie en éléments allergènes puissants dont il faut se méfier, voire en éradiquer la source, c’est-à-dire les végétaux impliqués devenus indésirables à proximité des regroupements humains.

La surexploitation de la planète par l’humain transforme ces pollens en agents biologiques nocifs, transformant ces voyages botaniques en un effrayant film d’anticipation de pollens potentiellement tueurs (l’asthme, déclenchée chez certains par le pollen, est une maladie mortelle). : le pollen en lui-même est trop gros pour provoquer une réaction allergique dans les bronches (asthme) mais il pouvant peut être fracturé/rompu pendant le transport aérien. Cette fracture du pollen nous expose plus facilement à son Le cytoplasme du grain de pollen est rempli de particules plus petites (0,2-4 µm : granules d’amidon et particules de polysaccharides) qui transportent les allergènes.  La rupture du grain de pollen lors de son transport dans l’atmosphère est donc une explication pour l’asthme car celui-ci est déclenché uniquement par des particules très fines (le pollen en lui-même est trop gros pour déclencher une crise d’asthme) et tout processus physique ou chimique (dont la pollution de l'air) facilitant cette rupture est un facteur de risque supplémentaire pour le déclenchement de crises d’asthmes..

Pour Baptiste Morizot « La crise écologique systémique qui est la nôtre est aussi une crise de la sensibilité au vivant. J’entends par là l’appauvrissement des mots, des capacités à percevoir, des émotions et des relations que nous pouvons tisser avec le monde vivant (….) (La joie qui) fait vraiment défaut, et qui m’intéresse, c’est la joie à l’idée de l’existence du vivant. Et la joie d’en être. Cet affect doit être inventé à partir de presque rien dans notre culture. Parce que les modernes ne sont pas au courant qu’ils sont des vivants, et quand ils le savent, ils le vivent plus comme un déclassement que comme un honneur. Être vivant, être de ce monde, partager avec les autres vivants une communauté de destin et une vulnérabilité mutuelle, tout cela ne fait pas partie de notre conception culturelle de nous -même. (in Politiser l’émerveillement et armer l’amour du vivant, Socialter déc 2020)

L’habitabilité de la terre, de l’air, passe par cette joie à retrouver, pour à nouveau faire famille avec le vivant avec lequel nous vivons. Pollenkin propose, par différents projets menés pendant la résidence de Karine Bonneval au laboratoire de Nicolas Visez, et grâce à la collaboration de scientifiques, d’étudiants au LASIRE, d’inventer des dispositifs imaginaires pour que les pollens anémophiles soit à nouveau constitutifs de notre tissu du vivant.

Pollenkin s'est transformé au fil du temps en un projet art et sciences comprenantpar une campagne de prélèvements incluse dans le doctorat de Klervi Vandenbossche (2022/2025), dont la thèse porte sur l’influence de la pollution sur l’allergénicité du pollen de bouleau.  Les sites choisis sont d’anciens sites miniers ou industriels aux sols pollués, des sites encore industriels aujourd’hui, des sites urbains. Le bouleau est une espèce pionnière qui pousse vite, sur des sols abimés, dérangés, anthropisés. Il est ainsi également le témoin de notre action sur le territoire.Le projet consiste à aller à la rencontre d’arbres spécifiques sur ces différents territoires des Hauts de France. Ces arpentages géolocalisés permettront de récolter leur pollen, le sol où ils poussent, leur sève, les lichens présents sur le territoire. Ils permettront d’écouter leur vie interne, de les découvrir par tous nos sens.

En interrogeant notre influence sur les cycles végétaux, nous pouvons ajuster notre attitude et imaginer un monde apaisé en interaction avec les plantes.

Ce projet bénéficie d'un soutien de l'ANR dans le cadre du projet de recherche Polluen